7 Techniques pour créer des pubs impactantes
Humour, complicité, authenticité, proximité, suspense… Difficile de résister aux campagnes qui jouent sur ces cordes sensibles.

«On fait quoi pour vous aujourd’hui ?» interroge le slogan de Monoprix. Les publicitaires du monde entier se posent la même question et essaient de trouver sur quelles cordes jouer pour nous séduire. «Capter l’attention du consommateur exige un certain talent d’interprétation des attentes de la société», analyse Mercedes Erra, qui dirige BETC Euro RSCG, l’une des premières agences françaises. Une société en pleine transition : fragilisée par la crise et cherchant à se réfugier dans l’authentique et l’utile, mais en même temps assoiffée de loisirs, plébiscitant le divertissement et l’accessoire. Serions-nous schizophrènes ? Voici en tout cas comment les publicitaires s’y prennent pour nous caresser dans le sens du poil.
Faire descendre des stars de leur piédestal
Devinez pourquoi les publicités Nespresso caracolent en tête des spots préférés des Français depuis leurs premières apparitions, en 2006 ? Parce que George Clooney y est maltraité : on y voit l’acteur, qui joue son propre rôle dans des situations dévalorisantes. D’autres divas inaccessibles descendent de leur piédestal. Nicole Kidman pimente la pub Schweppes d’un brin d’autodérision lorsqu’elle préfère cette boisson à un ténébreux séducteur indien.
«C’est la culture populaire véhiculée par les magazines people qui encourage à désacraliser les stars», explique Luc Wise, cofondateur de l’agence Herezie. Pour renforcer la connivence avec le public, rien de tel qu’une vedette qui affiche sa préférence pour le produit. Mimie Mathy, dans la vraie vie, utilise Décolor Stop. «Je ne fais pas de pub, sauf pour un produit dans lequel j’ai entièrement confiance», affirme la comédienne dans le spot. Visiblement, tout le monde y croit : après chaque diffusion, les ventes de la lingette antidécoloration grimpent de 10 à 30%.
Miser sur la nostalgie en rééditant les pubs d’antan
Délicieusement régressive, la pub nous ressort ses bonnes vieilles recettes. Mousline réédite un spot télévisé qui date de plus de trente ans sur fond de rengaine émouvante de ringardise. Chez Lustucru, l’inoxydable Germaine et sa tribu de martiens redéboulent après vingt ans d’absence. Quant à Carrefour, l’enseigne clame sans complexe : «Du positif chaque jour», en écho à sa campagne des années 1980 – «Avec Carrefour, je positive». «Ces tranches de nostalgie apportent du réconfort», décrypte Marie-Odile Duflo, directrice générale chez Ipsos. Un véritable effet doudou.
Mettre en scène de “vraies gens” à la place des acteurs
La publicité pour les cosmétiques nous avait imposé ses canons de beauté jusqu’à ce que Dove mette en scène, en 2005, des femmes ordinaires assumant leurs imperfections. Cette campagne en forme de manifeste contre la dictature de la beauté formatée a fait grand bruit. «Les consommateurs attendent des marques qu’elles fassent preuve d’authenticité», analyse Mercedes Erra. Du coup, la publicité utilise de «vraies gens» et le public applaudit. On s’identifie avec bonheur aux nouveaux millionnaires du Loto (la pub préférée des Français en 2008 dans le palmarès Ipsos) comme on se retrouve dans la galerie de portraits réalisée pour Petit Bateau et dont les modèles sont exclusivement des amateurs.
Flatter le consommateur avant de vanter le produit
Charline est attablée devant son ordinateur portable à la terrasse d’un café. «Récemment, il m’est venu une idée…», confie-t-elle. Et de revendiquer haut et fort que Windows 7 de Microsoft est né grâce à elle. Ce spot est emblématique d’une transformation radicale de notre rapport aux marques. «Le pouvoir est désormais entre les mains de l’individu», décrypte Marie-Odile Duflo, chez Ipsos. La marque s’efface pour laisser la place au consommateur. On vous séduit en vous parlant de vous, plutôt que du produit. «Venez comme vous êtes», invite McDonald’s ; «Vraiment moi-même», affirme Coca-Cola Light.
Tourner des spots avec des scénarios de long-métrage
A la manière d’un film d’action, la course poursuite nous tient en haleine. Traqué par des tueurs, un jeune homme se retrouve dans le placard d’une femme, sous le regard soupçonneux du mari. Récompensé par un Lion d’or à Cannes, ce spot pour Canal Plus joue la carte du «storytelling», qui consiste à raconter une histoire. Une mode servie par Internet et le succès des séries télévisées. BMW multiplie ainsi les miniproductions dans le style James Bond, avec l’acteur Clive Owen et BNP Paribas, cartonne avec sa Web-série «Mes Colocs» qui comptait plus de 6 millions de vidéos vues un mois et demi après son lancement, en mai dernier.
Associer les clients à la conception des campagnes
La pub à sens unique, c’est du passé. «Avec l’avènement du Web, les internautes réagissent, souligne Marie-Claude Sicard, experte en stratégie de marques et professeure associée au Celsa. Ce sont eux qui créent le buzz.» Comment capter leur attention ? En les invitant à être coauteurs des campagnes. C’est la stratégie qu’utilise Oasis, dont les héros de la saga télévisée – des fruits aux noms savoureux – font un malheur sur la Toile. Sur sa page Facebook, la boisson compte déjà 1,2 million de fans encouragés à élire le fruit de l’année (100.000 votes depuis le lancement mi-août), qui sera la vedette du prochain spot.
«On ne se contente plus de délivrer une information sur le produit, on partage une expérience de marque», explique Stanislas de Parcevaux, le directeur marketing. La marque de gel douche Old Spice, quant à elle, a surfé sur le succès de son spot «The man your man could smell like» (grand prix 2010 du film publicitaire à Cannes), qui a généré des millions de tweets : elle a posté en un temps record plus de 80 minividéos dans lesquelles le héros reprend les meilleurs commentaires des internautes.
Montrer que la pub sait aussi se moquer d’elle-même
L’autodérision ne fonctionne pas seulement pour les stars : le procédé est aussi efficace lorsque la publicité se moque d’elle-même. «Une façon pour les professionnels de saluer la maturité des consommateurs», constate Luc Wise, de l’agence Herezie. Neuf Télécom avait ouvert le bal en 2006 avec une série de films dont les héros éreintaient les clichés du métier… de publicitaire. Cette année, Eram placarde : «Le photographe a demandé une fortune. Le mannequin est sous antidépresseurs. Le styliste fait semblant d’être gay. Tout ça pour des boots à 49,90 euros.»
Christine Halary| Capital.fr